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poemes

Publié le 11 Juin 2021

Charles-Ferdinand Ramuz 1878-1947

La vieille

Elle était déjà bien vieille
quand les vieux d’à présent étaient petits,
elle est d’un autre temps, elle est restée, et puis
elle s’est oubliée.

Elle est du temps passé où les femmes portaient
des coiffes de dentelles,
des fichus tout brodés, des jupes de mitaine
avec beaucoup de plis.

Elle est du temps où on parlait encore patois,
où les gens allaient à la ville,
une fois par année, aux fêtes de la Dame ;
et, montant à la cathédrale
avec des graines dans leur poche,
ils faisaient le tour de la grosse cloche.

Elle est d'un temps si vieux qu'on ne s'en souvient plus.
Mais, elle, elle s'en souvient, elle ferme les yeux
pour mieux s'en souvenir ;
et elle est là, assise au soleil sans rien dire,
songeant à son passé, à ceux qui sont partis
et à sa solitude.

Les poèmes de Ramuz sont plutôt écrits en prose et décrivent la vie telle qu'elle est. Il décrit tout ce qu'il voit et de ce fait, nous fait entrer dans la réalité terrestre

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes

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Publié le 24 Mai 2021

 
Victor Hugo
"J'ai bien assez vécu, puisque dans mes douleurs
Je marche, sans trouver de bras qui me secourent,
Puisque je ris à peine aux enfants qui m'entourent,
Puisque je ne suis plus réjoui par les fleurs ;
Puisqu'au printemps, quand Dieu met la nature en fête,
J'assiste, esprit sans joie, à ce splendide amour ;
Puisque je suis à l'heure où l'homme fuit le jour,
Hélas ! et sent de tout la tristesse secrète ;
Puisque l'espoir serein dans mon âme est vaincu ;
Puisqu'en cette saison des parfums et des roses,
Ô ma fille ! j'aspire à l'ombre où tu reposes,
Puisque mon cœur est mort, j'ai bien assez vécu.
Je n'ai pas refusé ma tâche sur la terre.
Mon sillon ? Le voilà. Ma gerbe ? La voici.
J'ai vécu souriant, toujours plus adouci,
Debout, mais incliné du côté du mystère.
J'ai fait ce que j'ai pu ; j'ai servi, j'ai veillé,
Et j'ai vu bien souvent qu'on riait de ma peine.
Je me suis étonné d'être un objet de haine,
Ayant beaucoup souffert et beaucoup travaillé.
Dans ce bagne terrestre où ne s'ouvre aucune aile,
Sans me plaindre, saignant, et tombant sur les mains,
Morne, épuisé, raillé par les forçats humains,
J'ai porté mon chaînon de la chaîne éternelle.
Maintenant, mon regard ne s'ouvre qu'à demi ;
Je ne me tourne plus même quand on me nomme ;
Je suis plein de stupeur et d'ennui, comme un homme
Qui se lève avant l'aube et qui n'a pas dormi.
Je ne daigne plus même, en ma sombre paresse,
Répondre à l'envieux dont la bouche me nuit.
Ô Seigneur ! ouvrez-moi les portes de la nuit,
Afin que je m'en aille et que je disparaisse !"
Les Contemplations

C'est un vingt-deux mai que le grand écrivain a quitté ce monde pour la cité céleste. Le cortège a été suivi par deux millions de personnes de la place de l’Étoile au Panthéon.

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes, #Grands personnages

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Publié le 9 Avril 2021

Un rhinocéros jeune et fort
Disait un jour au dromadaire :
Expliquez-moi, s'il vous plaît, mon cher frère,
D'où peut venir pour nous l'injustice du sort.
L'homme, cet animal puissant par son adresse,
Vous recherche avec soin, vous loge, vous chérit,
De son pain même vous nourrit,
Et croit augmenter sa richesse
En multipliant votre espèce.
Je sais bien que sur votre dos
Vous portez ses enfants, sa femme, ses fardeaux ;
Que vous êtes léger, doux, sobre, infatigable ;
J'en conviens franchement : mais le rhinocéros
Des mêmes vertus est capable.
Je crois même, soit dit sans vous mettre en courroux,
Que tout l'avantage est pour nous :
Notre corne et notre cuirasse
Dans les combats pourraient servir ;
Et cependant l'homme nous chasse,
Nous méprise, nous hait, et nous force à le fuir.
Ami, répond le dromadaire,
De notre sort ne soyez point jaloux ;
C'est peu de servir l'homme, il faut encor lui plaire.
Vous êtes étonné qu'il nous préfère à vous :
Mais de cette faveur voici tout le mystère,
Nous savons plier les genoux.

Jean-Pierre Claris de Florian -1755-1794. Recueil: Fables (1792)

Les fables de ce poète sont réputées pour être les meilleures après celles de Jean de la Fontaine.

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes

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Publié le 29 Mars 2021

Le soleil s'est couché ce soir dans les nuées ;
Demain viendra l'orage, et le soir, et la nuit ;
Puis l'aube, et ses clartés de vapeurs obstruées ;
Puis les nuits, puis les jours, pas du temps qui s'enfuit !

Tous ces jours passeront ; ils passeront en foule
Sur la face des mers, sur la face des monts,
Sur les fleuves d'argent, sur les forêts où roule
Comme un hymne confus des morts que nous aimons.

Et la face des eaux, et le front des montagnes,
Ridés et non vieillis, et les bois toujours verts
S'iront rajeunissant ; le fleuve des campagnes
Prendra sans cesse aux monts le flot qu'il donne aux mers.

Mais moi, sous chaque jour courbant plus bas ma tête,
Je passe, et, refroidi sous ce soleil joyeux,
Je m'en irai bientôt, au milieu de la fête,
Sans que rien manque au monde immense et radieux !

Victor Hugo, Les Feuilles d'Automne

 

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes

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Publié le 11 Novembre 2020

 
Automne malade et adoré
Tu mourras quand l’ouragan soufflera dans les roseraies
Quand il aura neigé
Dans les vergers
Pauvre automne
Meurs en blancheur et en richesse
De neige et de fruits mûrs
Au fond du ciel
Des éperviers planent
Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines
Qui n’ont jamais aimé
Aux lisières lointaines
Les cerfs ont bramé
Et que j’aime ô saison que j’aime tes rumeurs
Les fruits tombant sans qu’on les cueille
Le vent et la forêt qui pleurent
Toutes leurs larmes en automne feuille à feuille
Les feuilles
Qu’on foule
Un train
Qui roule
La vie
S’écoule
 
Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913

 

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes, #Littérature française

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Publié le 5 Octobre 2020

Victor Hugo

Aux petits incidents il faut s’habituer.
Hier on est venu chez moi pour me tuer.
Mon tort dans ce pays c’est de croire aux asiles.
On ne sait quel ramas de pauvres imbéciles
S’est rué tout à coup la nuit sur ma maison.
Les arbres de la place en eurent le frisson,
Mais pas un habitant ne bougea. L’escalade
Fut longue, ardente, horrible, et Jeanne était malade.
Je conviens que j’avais pour elle un peu d’effroi.
Mes deux petits-enfants, quatre femmes et moi,
C’était la garnison de cette forteresse.
Rien ne vint secourir la maison en détress
e.
La police fut sourde ayant affaire ailleurs.
Un dur caillou tranchant effleura Jeanne en pleurs.
Attaque de chauffeurs en pleine Forêt-Noire.

Ils criaient : Une échelle ! une poutre ! victoire !
Fracas où se perdaient nos appels sans écho.

Deux hommes apportaient du quartier Pacheco
Une poutre enlevée à quelque échafaudage.
Le jour naissant gênait la bande. L’abordage
Cessait, puis reprenait. Ils hurlaient haletants.
La poutre par bonheur n’arriva pas à temps.
 » Assassin ! – C’était moi. – Nous voulons que tu meures !
Brigand ! Bandit !  » Ceci dura deux bonnes heures.
George avait calmé Jeanne en lui prenant la main.
Noir tumulte. Les voix n’avaient plus rien d’humain ;
Pensif, je rassurais les femmes en prières,
Et ma fenêtre était trouée à coups de pierres.
Il manquait là des cris de vive l’empereur !
La porte résista battue avec fureur.
Cinquante hommes armés montrèrent ce courage.
Et mon nom revenait dans des clameurs de rage :
A la lanterne ! à mort ! qu’il meure ! il nous le faut !
Par moments, méditant quelque nouvel assaut,
Tout ce tas furieux semblait reprendre haleine ;
Court répit ; un silence obscur et plein de haine
Se faisait au milieu de ce sombre viol ;
Et j’entendais au loin chanter un rossignol.

L'année terrible.

Victor Hugo a écrit ce poème décrivant l'hostilité dans laquelle il vivait avec sa famille, alors qu'il a été dans l'obligation de s'exiler en Belgique à cause de ses opinions politiques, sous Napoléon III.

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes

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Publié le 1 Mai 2020

Le mai le joli mai en barque sur le Rhin
Des dames regardaient du haut de la montagne
Vous êtes si jolies mais la barque s’éloigne
Qui donc a fait pleurer les saules riverains ?

Or des vergers fleuris se figeaient en arrière
Les pétales tombés des cerisiers de mai
Sont les ongles de celle que j’ai tant aimée
Les pétales flétris sont comme ses paupières

Sur le chemin du bord du fleuve lentement
Un ours un singe un chien menés par des tziganes
Suivaient une roulotte traînée par un âne
Tandis que s’éloignait dans les vignes rhénanes
Sur un fifre lointain un air de régiment

Le mai le joli mai a paré les ruines
De lierre de vigne vierge et de rosiers
Le vent du Rhin secoue sur le bord les osiers
Et les roseaux jaseurs et les fleurs nues des vignes

Guillaume Apollinaire, Rhénanes, Alcools, 1913

 

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes

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Publié le 27 Janvier 2020

La neige à travers la brume
Tombe et tapisse sans bruit
Le chemin creux qui conduit
A l'église où l'on allume
Pour la messe de minuit.

Londres sombre flambe et fume ;
La chair qui s'y cuit
Et la boisson qui s'ensuit !
C'est Christmas et sa coutume
De minuit jusqu'à minuit.

Sur la plume et le bitume,
Paris bruit et jouit.
Ripaille et Plaisant déduit
Sur le bitume et la plume
S'exaspèrent dès minuit.

Le malade en l'amertume
De l'hospice où le poursuit
Un espoir toujours détruit
S'épouvante et se consume
Dans le noir d'un long minuit...

La cloche au son clair d'enclume
Dans la cour fine qui luit,
Loin du péché qui nous nuit,
Nous appelle en grand costume
A la messe de minuit.

Paul Verlaine (1844-1896), recueil: Bonheur

 

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes, #Classiques français

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Publié le 25 Décembre 2019

Le ciel est noir, la terre est blanche ;
– Cloches, carillonnez gaîment ! –
Jésus est né ; – la Vierge penche
Sur lui son visage charmant.

Pas de courtines festonnées
Pour préserver l’enfant du froid ;
Rien que les toiles d’araignées
Qui pendent des poutres du toit.

Il tremble sur la paille fraîche,
Ce cher petit enfant Jésus,
Et pour l’échauffer dans sa crèche
L’âne et le boeuf soufflent dessus.

La neige au chaume coud ses franges,
Mais sur le toit s’ouvre le ciel
Et, tout en blanc, le chœur des anges
Chante aux bergers :  » Noël ! Noël !  »

Théophile Gautier

 

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes

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Publié le 10 Décembre 2019

 

Plus de belle campagne,
Plus de feuillage vert,
L'enfant de la montagne,
Hirondelle d'hiver,
Chante en la cheminée
Où naguère a chanté,
Aux beaux jours de l'année,
L'hirondelle d'été.

Et sur les promenades
Plus de charmants bouquets,
Plus de douces œillades,
De manèges coquets,
Là-bas, sous les grands ormes,
Où venaient tous les soirs,
Femmes aux blanches formes,
Aux épais cheveux noirs.


Or, que faire en sa chambre
Quand, sur ses traits maigris,
Le soleil de décembre
Met son capuchon gris !
Il faut se mettre à l'aise,
Commodément assis,
Et, les pieds dans la braise,
S'endormir sans soucis.

Ou bien si d'aventure
On a le cœur épris
Pour une créature
Qui ne soit pas sans prix,
Il fait bon, il me semble,
La prendre dans ses bras,
Et tous les deux ensemble,
Se mettre entre deux draps.

                                                            François-Marie Robert-Dutertre (1815-1898)

Les Loisirs lyriques

                                                                                                                  

Lac du Bouchet.

 

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Poèmes

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