Aux jeunes soldats morts.
Publié le 23 Février 2008
Émile Verhaeren
Vous ne reverrez plus les monts, les bois, la terre,
Beaux yeux de mes soldats qui n'aviez pas vingt ans
Et qui êtes tombés en ce dernier printemps
Ou plus que jamais douce apparut la lumière.
On n'osait plus songer aux champs d'or
Que l'aube a revêtu de sa gloire irisée;
Seule, la sombre guerre occupait la pensée
Quand, au fond des hameaux on apprit votre mort.
Depuis votre départ, à l'angle de la glace,
Votre image attirait et le cœur et les yeux;
Et nul ne s'asseyait sur l'escabeau boiteux
Où tous les soirs, près du foyer, vous preniez place.
Hélas, où sont vos corps jeunes, puissants et fous?
Où vos bras et vos mains, et les gestes superbes
Qu'avec la grande faux vous faisiez dans les herbes ?
Hélas, la nuit immense est descendue sur vous.
(...)
(in Les ailes rouges de la guerre).