Publié le 22 Avril 2011

                                                                                                             Léon Tolstoî    

    Pour acheter une forêt à laquelle il tient parce que le prix est très avantageux, Vassili Andréitch se met en route accompagné de son fidèle serviteur Nikita.

    Ce dernier aime son maître qui est bon, tout en sachant quelle manière étrange a cet homme de le traiter. Mais il a compris depuis longtemps qu'il est vain de protester et que la meilleure façon de faire face dans sa situation peu enviable, c'est encore de l'accepter malgré tout, et d'un cœur content. Nikita est un homme paisible, conciliant qui sert son maître consciencieusement et sans rechigner.

     Le maître et son serviteur s'en vont donc,en traîneau, tiré par un bon cheval, mais il fait très mauvais. Très vite, les deux hommes n'y voient plus grand chose dans cette neige épaisse qui ne cesse de tomber et dans laquelle ils finissent par se perdre. A bout de forces, la nuit venue, ils sont contraints de s'arrêter tout en sachant que dans ce froid glacial c'est la mort qui les guette.

    Vassili Andréitch s'installe dans le traîneau, chaudement enveloppé dans deux pelisses bien épaisses et se met à songer. Il pense tout d'abord au bon argent qu' il va gagner et qui va lui permettre de faire des projets plaisants. Mais peu à peu l'inquiétude le saisit et il se rend compte du danger dans lequel il se trouve, il décide donc d'agir:  "Qu'ai-je à rester ici à attendre la mort? J'enfourche le cheval, et en avant! se dit-il tout à coup."

    Nikita ne se couche qu'après avoir pris soin du pauvre cheval courageux, puis, tant bien que mal il se fabrique un lit fait de paille dans un trou de neige et il ne bouge plus. Plus le temps passe, plus il devient clair pour lui qu'il n'en réchappera pas. Mais cela ne le chagrine pas, quelle vie a t-il eu jusqu'à présent et quel avenir l'attend?  "La pensée qu'il pouvait, qu'il devait même vraisemblablement périr cette nuit, lui vint à l'esprit; mais cette pensée ne  lui parut pas très désagréable, ni trop effrayante. Elle ne lui parut pas trop désagréable, parce que son existence n'avait nullement été une fête continuelle, mais avait été au contraire une servitude incessante et dont il commençait à être las."

     Vassili Andréitch erre dans la tourmente, essayant de toutes ses forces de s'en sortir, éprouvant une terreur bouleversante. Alors il revient au traîneau. Et cet homme, qui, égoïstement avait abandonné son serviteur, craignant qu'il ne meurt, se couche sur lui pour le réchauffer. Il est alors saisi d'une joie inconnue, jamais éprouvée jusqu'alors, qui le transporte au-delà de la vanité de sa vie, dans des régions de bonheur indicible.

Beaucoup aimé.

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Littérature russe

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Publié le 18 Avril 2011

                                                                                                             Léon Tostoî  

     Conseiller à la cour d'appel, Ivan Illitch mène une vie agréable. Il aménage sa vie le plus agréablement possible pour pouvoir poursuivre le seul but de sa vie, à savoir sa propre satisfaction. C'est ainsi que, constatant que sa femme, devenue acariâtre, l'ennuie au plus haut point, il travaille davantage pour trouver la tranquillité à laquelle il aspire. Ivan Illitch est un égoïste notoire, mais il ne s'en rend pas compte, il croit qu'il agit bien et fait tout ce qu'il faut. "A cette réserve près, son existence s'écoulait conformément à ses vœux de toujours: aisée, plaisante et comme il faut.". Tout va donc bien pour Ivan Illitch. Pourtant un jour il ressent un malaise qui s'accroît rapidement et se met à affecter de plus en plus son humeur.

     De quoi souffre-t-il au juste? Nul ne le sait, mais la peur s'installe en lui et il est obligé de se questionner enfin sur son état: "suis-je mal, très mal, ou bien cela peut-il encore aller?...    Mais la maladie empire, la douleur devient si aiguë que le malade comprend que la mort, à laquelle il a refusé de croire jusqu'alors, est là, présente, et qu'un jour elle l'atteindra.  Son entourage, bien que le voyant malade, ne croit pas à l'issue fatale et lui ment sans scrupules, ce qui l'exaspère profondément.  "Rien ne le faisait souffrir comme le mensonge, ce mensonge généralement admis et adopté qu'il était malade, mais point mourant, qu'il lui suffisait de se soigner, de rester tranquille, pour que tout s'arrangeât pour le mieux."

    Enfin, à bout, Ivan Illitch s'interroge sur les causes de cette affreuse souffrance et se rend compte que sa vie n'a pas été ce qu'elle aurait dû être: "Peut-être n'ai-je pas vécu comme je devais vivre? Il  se bat encore avec la mort, et dans ce combat terrible il se souvient de ses agissements, de ses joies, qu'il trouve maintenant futiles, il réalise qu'il a manqué sa vie et qu'il a fait souffrir injustement  ses proches.

       Très bien!  Une bonne analyse des sentiments qu'un être humain peut éprouver devant la mort: le refus, la lutte, les interrogations de toutes sortes, l'acceptation, et le remords.

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Rédigé par Alicia

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Publié le 13 Avril 2011

                                                                                                          Sandor Marai 

    Au bout de quarante ans, un vieux général hongrois reçoit dans son grand château, la visite de son ami d'enfance: Conrad. Le général est vieux et il n'a jamais vécu ces dernières années que pour cet instant où, de la bouche de son ami, il pourra enfin connaître la vérité sur ce qui s'est passé un certain soir, il y a si longtemps!

     Les deux hommes s'installent, après un plantureux diner, devant le feu de cheminée, comme à la dernière soirée avant l'éclatement: même décor, mêmes fauteuils, mêmes places.

     Le conciliabule se poursuit toute la nuit et au fur et à mesure que le temps s'écoule, le mystère s'éclaircit, la vérité apparait. Mais apparait-elle vraiment? Les deux hommes, autrefois amis, s'affrontent  sur un ton courtois mais ferme, qui ne laisse nullement penser à l'autre qu'il puisse y avoir le moindre doute sur le passé. Des secrets inavouables sont dévoilés, mêlés à  des sentiments de colère, d'amertume, de déception, de jalousie et surtout de haine. On cherche à savoir, à comprendre les motivations profondes qui ont poussé à la destruction de cette amitié autrefois si pure et si profonde. En effet, les deux hommes avaient tissé un lien fort, basé sur une confiance totale qui excluait toute idée de trahison et qui entendait durer toute la vie. Mais cela est-ce possible? Est-ce qu'une amitié aussi belle soit-elle, peut défier le temps et surtout les circonstances adverses?

    Sandor Marai nous brosse dans cette histoire un tableau sombre de l'amitié qui ne résiste pas aux assauts de l'existence, des réflexions très judicieuses sur ce sentiment qui aujourd'hui se raréfie de plus en plus.

    " L'ami, pas plus que l'amant, n'a le droit d'exiger la récompense de ses sentiments... il ne devrait pas considérer comme surnaturel l'être choisi mais, connaissant les défauts de celui-ci, il devrait l'accepter avec ses défauts et toutes les conséquences de ses défauts.

    "Je me suis souvent demandé si la véritable essence de tous les liens humains n'est pas le désintéressement qui n'attend ni ne veut rien, mais absolument rien de l'autre et qui réclame d'autant moins qu'il donne davantage."

Les Braises

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Rédigé par Alicia

Publié dans #Littérature hongroise

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