Publié le 11 Novembre 2006
Paroles de Poilus
On ne peut imaginer la douleur de ces jeunes hommes, qui ont du abandonner leurs proches d'une manière aussi atroce, sotte et inutile.Toutes ces lettres sont poignantes.
Le caporal Henry Floch était greffier de la justice de paix à Breteuil. Il est un des six "Martyrs de Vingré".
Ma bien chère Lucie,
Quand cette lettre te parviendra, je serai mort fusillé.
Voici pourquoi :
Le 27 novembre, vers 5 heures du soir, après un violent bombardement de deux heures, dans une tranchée de première ligne, et alors que nous finissions la soupe, des Allemands se sont amenés dans la tranchée, m'ont fait prisonnier avec deux autres camarades. J' ai profité d' un moment de bousculade pour m'échapper des mains des Allemands. J'ai suivi mes camarades, et ensuite, j'ai été accusé d'abandon de poste en présence de l'ennemi.
Nous sommes passés vingt- quatre hier soir au Conseil de Guerre. Six ont été condamnés à mort dont moi. Je ne suis pas plus coupable que les autres, mais il faut un exemple.
Mon portefeuille te parviendra et ce qu' il y a dedans.
Je te fais mes derniers adieux à la hâte, les larmes aux yeux, l'âme en peine. Je te demande à genoux humblement pardon pour toute la peine que je vais te causer et l'embarras dans lequel je vais te mettre. . .
Ma petite Lucie, encore une fois, pardon.
Je vais me confesser à l'instant, et espère te revoir dans un monde meilleur.
Je meurs innocent du crime d'abandon de poste qui m'est reproché. Si au lieu de m'échapper des Allemands, j'étais resté prisonnier, j'aurais encore la vie sauve. C'est la fatalité.
Ma dernière pensée, à toi jusqu'au bout.